Patricia G.

C’est à un sympathique groupe de personnes assises ensemble derrière une table remplie de plats mexicains que je me suis adressé à mon arrivée au mercredi pique-nique du parc Tolhurst. On m’a rapidement informé que tous étaient soit de la famille de Patricia, soit des amis venus lui donner un coup de main pour la soirée. Comme elle, ils étaient pour la plupart originaires de la ville de Mexico ou autrement de la région d’Aguascalientes.

Patricia est boulangère-pâtissière.

C’est à titre de membre de la toute nouvelle SDC Quartier FLO (comme dans Fleury Ouest) que Patricia offre ses produits aux pique-niqueurs du mercredi. Patricia est arrivée à Montréal avec mari et enfants il y a neuf ans. Après avoir travaillé brièvement comme aide-éducatrice dans une garderie, elle a ouvert, il y a 7 ans, avec son mari Luis, la Boulangerie et pâtisserie mexicaine Patricia tout juste à l’ouest du parc Tolhurst. Le couple avait tenu le même genre de commerce à Mexico.

Leur comptoir des mercredis pique-nique offre des plats différents chaque semaine. Il y a ainsi moyen de trouver un repas complet sur la table. Ce jour-là, il y avait des tacos dorados et de la paëlla, en plus des pâtisseries et des cubes de melon d’eau servis épicés ou non. La première fois que j’ai visité leur table, il y avait du pollo con mole poblano (du poulet dans une sauce typique au cacao).

Si le commerce était surtout connu de quelques Mexicains à ses débuts, la clientèle s’est développée et diversifiée avec les années. La spécialité de la maison est le « pastel de tres leches » (gâteau aux trois laits).

Aujourd’hui, Patricia et Luis estiment se tirer d’affaire au moins aussi bien que dans leurs bonnes années à Mexico. Malgré des racines toujours fortes − les casquettes « Viva Mexico » en faisant foi −, ils se considèrent installés ici à demeure. Leurs enfants ont d’ailleurs déjà commencé à faire leur chemin. Il faut dire qu’à la vitesse où ce petit quartier change, ils sont déjà des vétérans! En effet, l’ouverture de leur boulangerie a précédé de quelque peu celle du restaurant St-Urbain qui a fait tourner les têtes vers FLO.

Patricia in Tolhurst Park

Denise P.

J’ai connu Denise récemment lors d’un vernissage à la Maison culturelle et communautaire de Montréal-Nord. J’ai été frappé par la chaleur et la conviction avec laquelle elle présentait l’artiste qui y expose pour l’été 2015. C’est toutefois lors d’une rencontre subséquente sur le site des Moulins de l’Île-de-la-Visitation que cette résidente d’Ahuntsic m’a raconté son parcours.

Neuvième de dix enfants d’une famille modeste, avec un père qui travaillait au CN, Denise a le souvenir d’avoir marché, petite, de la résidence familiale rue de Lille près de Charland jusqu’au rivage. Les terrains à l’époque étaient en bonne partie en friche, remarque-t-elle, et n’annonçaient pas le beau parc d’aujourd’hui.

À l’adolescence, cette passionnée de la ville et de la vie a entrepris, malgré son jeune âge, de se faire engager au sein de l’équipe qui préparait l’Expo 67. Pour ce faire, elle s’est acheté un tailleur et a sollicité à plusieurs reprises une rencontre avec le Maire de Terre des Hommes, Philippe de Gaspé-Beaubien. À force d’entêtement, elle a obtenu le rendez-vous et un modeste emploi dans l’équipe, puis un poste d’hôtesse au Pavillon du Québec pendant l’Expo. Comme pour bien des gens qui y ont travaillé, l’expérience fut grisante et lui a ouvert des portes. L’année suivante, elle s’est rendue en Grande-Bretagne pour apprendre l’anglais et s’est déniché un emploi de réceptionniste à l’ambassade canadienne. Quelque année plus tard, elle a été embauchée au pavillon du Québec à l’exposition internationale d’Osaka.

C’est avec ce bagage de femme autonome qu’elle est devenue mère. Mariée à un universitaire mathématicien et économiste avec qui elle a eu trois filles, elle l’a suivi avec les enfants en Californie, où il a complété un doctorat. Décidée à demeurer autonome, elle y a enseigné la conversation française dans un cadre universitaire, sans détenir de diplôme elle-même. De retour au Québec, à Rimouski, où son mari avait repris un poste d’enseignant à UQAR, elle a travaillé à la station locale de Radio-Canada avant d'entreprendre un bac en communication à Université Laval. 

Après avoir occupé des postes temporaires dans le Réseau Accès-Culture dans différents arrondissements de Montréal, elle a enfin obtenu sa permanence comme agente culturelle à Montréal-Nord il y a deux ans, à un âge où plusieurs sont déjà à la retraite. À ce titre, elle fait des efforts importants pour rapprocher les gens de la communauté et les artistes, elle a notamment monté une exposition des artistes de la galerie d’art urbain Fresh Paint et présenté le spectacle interculturel « Des mots sur mesure », ainsi qu’une série de spectacles de Blues. Elle prépare actuellement des activités de médiation culturelle pour l’inauguration, à l’automne 2015, de l’œuvre « La vélocité des lieux » du collectif d’artistes BGL.

Cette passionnée de culture projette de continuer à partager encore longtemps ses coups de cœur.

Denise au PArc-Nature de l'Île-de-la-Visitation

Abdelkarim M., Zineb E. & Seddik

Comme vous devez vous en douter, il me faut parfois parlementer un peu avec les personnes que je rencontre avant de gagner leur confiance. Dans le cas d’Abdelkarim et Zineb, ce fut plus simple. Ils ont accepté spontanément de participer à mon projet. Zineb m’a même gracieusement offert du thé à la menthe avec des baklavas maison.

C’est par une vraie journée de canicule que je les ai rencontrés au Parc-Nature de l’Île-de-la-Visitation. Assis par terre dans l’aire de pique-nique avec leur fils Seddick, ils finissaient de souper. Ils projettent d’ailleurs de visiter ainsi différents parcs dans le secteur au cours de l’été afin de mieux connaitre leur milieu de vie. Ce ne sera évidemment pas la Méditerranée, qui leur manque un peu, mais il y a tout de même de beaux parcs en bordure du rivage dans notre secteur.

Abdelkarim a vécu quelques années en France. Il y a fait des études en génie jusqu’au niveau de la maitrise. Comme d’autres gens que j’ai croisés, il est ensuite venu au Québec dans l’espoir de meilleures perspectives d’emploi.  Pour mettre toutes les chances de son côté, il a même recommencé ses études en génie afin d’obtenir un diplôme local. C’est par un ami qu’il a entendu parler d’Ahuntsic. Il est arrivé ici muni de son certificat de sélection du Québec. Il a eu la chance de passer à travers les procédures d’immigration assez rapidement et a depuis peu la citoyenneté canadienne.

Abdelkarim est natif d’Alger, son épouse, Zined, de Djelfa. C’est lors d’un séjour en Algérie qu’il a rencontré Zineb. Leur relation s’est ensuite développée via internet. Zineb l’a rejoint ici il y a deux ans et a occupé un emploi brièvement avant que sa grossesse n’avance. Le petit Seddick, qui commence à se tenir debout avec l’aide de ses parents, fera bientôt ses premiers pas tout seul. Il est né ici au cours de l’été 2014.

Fraichement diplômé de l’École Polytechnique de Montréal, Abdelkarim est activement à la recherche d’un emploi en génie électrique. Il m’a dit être prêt à déménager là où le mènera le travail. Preuve de sa volonté, il a récemment fait des séjours exploratoires à St-Jean-sur-Richelieu et à Shawinigan via l’organisme Place aux jeunes en région. Ils m’ont dit qu’ils se plaisaient bien au Québec, mais qu’avec un jeune enfant à élever, ils considèreraient se rendre en Alberta si Abdelkarim ne trouve pas d’emploi ici rapidement.

J’ai senti beaucoup d’ouverture d’esprit et la volonté de se bâtir un avenir parmi nous chez Abelkarim et Zineb. J’ose espérer qu’un employeur québécois appréciera également ces bonnes dispositions.

Zineb, Seddik & Abdelkarim au Parc-Nature de L'Île-de-la-Visitation

Robbie P.

Certains sujets d’un naturel pittoresque s’offrent d’eux-mêmes à la caméra. En passant dans le Parc Ahuntsic, j’ai aperçu deux hommes attablés pour jouer aux échecs. Un classique. Quand je suis revenu sur mes pas, Robbie était seul à la table, j’ai donc pu entamer la conversation avec lui sans interrompre leur jeu. C’est un plus tard, quand son copain Martin est revenu à la table, que j’ai pris des photos des deux joueurs à l’œuvre.

C’est Martin qui, apercevant ma caméra, m’a appris que Robbie était photographe. Et pas n’importe lequel : Robbie est un passionné de photo argentique! Non seulement utilise-t-il de la pellicule, mais il fait ses propres tirages, même en couleur, ce qui est assez peu commun aujourd’hui. Il vit d’une combinaison de petits contrats photographiques, comme de la photo de plateau, de travaux de rénovations et de revente de matériel photo usagé pour l’argentique. Il a fait des reportages et de la photo artistique dans des endroits comme La Nouvelle-Orléans, Cuba ou Haïti. Il fait aussi de la photo pour des dossiers de casting de comédiens.

Par un heureux hasard, une exposition de ses œuvres se terminait le lendemain à la Galerie Kozen, Avenue Duluth est. J’y suis passé avec intérêt. J’ai apprécié son engagement dans son travail. Si l’occasion s’offre à vous de voir un jour ses photos, ne la manquez pas!

Je l’ai croisé de nouveau alors que je m’apprêtais à quitter les lieux. En conversant encore un peu, j’ai aussi appris qu’il avait pratiqué la peinture en autodidacte avant de faire des études en Arts Visuels à l’UQAM. Ses parents étaient tous deux artistes, ça y est probablement pour quelque chose, bien que les enfants ne suivent pas toujours la voie tracée, surtout lorsqu’elle est aussi ardue.

Robbie est né à Pointe-Claire et a habité dans plusieurs quartiers de Montréal, dont une décennie dans le Plateau. Il a aussi vécu un temps à divers endroits dans les environs de St-Eustache. Il habite depuis 3 ans dans le Sault-au-Récollet et apprécie le quartier pour sa quiétude.

Quand est venu le temps de faire son portrait, il m’a prévenu qu’il ne souriait pas. Quelque chose me dit cependant qu’il y a parfois des fissures sous ce masque. 

Robbie à l'échiquier