Stéphane T.

Lors du déjeuner mensuel d’une association de retraités de Montréal-Nord, j’avais acheté, des mains de son auteur, le livre « Montréal-Nord raconte 100 ans, 1915-2015 ». Dans ce bouquin, il y avait un signet qui annonçait, pour le lundi suivant, une activité de la Société d’histoire et de généalogie de Montréal-Nord à la Bibliothèque Charleroi. Il s’agissait d’une conférence intitulée « Laissez-nous vous raconter Montréal-Nord ».

Je me suis donc rendu à cette bibliothèque pour y assister parmi un groupe de près de soixante-quinze citoyens. C’est là que j’ai fait connaissance avec Stéphane.

Auteur de cette conférence, il est historien de formation. Stéphane a complété son bac à l’UQAM. Il est à la fois conteur, conférencier, chroniqueur, guide et animateur spécialisé en histoire. Une bonne partie de l’assistance était constituée de gens aux cheveux blancs qui avaient eux-mêmes vécu une importante tranche du centenaire de la municipalité. À l’arrière de la salle, il y avait aussi un groupe de jeunes venus à l’initiative du Centre jeunesse-emploi local.

J’ai rapidement constaté que Stéphane était bien connu de la partie sénior du public et qu’il ne leur passerait pas d’inexactitudes sur les événements des 50 dernières années. Il pouvait cependant se permettre une certaine familiarité avec eux et alterner entre un ton bourru et une attitude humoristique teintée de bonhommie et d’ironie. La conférence se déroula rondement avec de nombreux échanges verbaux avec les participants, qui, dans leur ensemble, étaient captivés et attentifs. Stéphane a même réussi à maintenir l’intérêt des plus jeunes.

Sa conférence commençait par les premières visites des Français à l’Île de Montréal au seizième siècle. Il nous traça les grandes lignes de l’histoire du village et de la paroisse du Sault-au-Récollet à partir du Régime français jusqu’au détachement d’une partie de son territoire appelée « Bas du Sault » pour fonder la municipalité de Montréal-Nord. Pour ceux qui l’ignoreraient, la Rivière des prairies permettait d’avancer plus en amont autour de l’Île que le fleuve, jusqu’au pied des derniers rapides. Ce lieu correspond à l’emplacement du noyau villageois historique du Sault. Comme les demeures, essentiellement occupées par des agriculteurs, étaient éparses le long de ce qui est aujourd’hui le Boulevard Gouin, il subsiste un plus grand nombre de constructions provenant du régime français dans ce secteur de l’île que dans le Vieux-Montréal. Dans le centre historique de Montréal, en effet, la proximité des immeubles a fait en sorte que plusieurs d’entre eux ont été ravagés par de grands incendies ou ont été victimes du développement routier et immobilier.

Stéphane est natif de Montréal-Nord. Il y a fréquenté l’école primaire St-Vincent-Marie Strambi. Il a grandi au sein d’une famille de quatre enfants. La résidence familiale était située à proximité du Centre d’achat Forest, le premier de la municipalité, construit en 1957. Il a cependant passé son adolescence de l’autre côté de la rivière, à Saint-Vincent de Paul, quartier où son père entrepreneur possédait des terrains. Il habite depuis plusieurs années le Plateau Mont-Royal, mais conserve des liens avec les quartiers qui l’ont vu grandir. Il a ainsi collaboré aux activités des diverses sociétés historiques du nord de l’île, de Laval et de la couronne nord. Ses activités vont des soirées de contes aux visites commentées du patrimoine bâti. Certains d’entre vous l’auront possiblement entendu au cours d’activités organisées par Cité-Historia ou pour des groupes privés.

S’il a occupé certains emplois d’animateur et de médiateur culturel dans des institutions, au Musée Dufresne par exemple, il s’est rapidement aperçu qu’il n’était pas fait pour évoluer dans un cadre rigide. Si j’ai bien compris, le côté bourru qu’il affichait par moment au cours de sa conférence n’était pas totalement feint. Il peut parfois avoir mauvais caractère ou, à tout le moins, la tête dure. Travailleur autonome de longue date, il a une prédilection pour les activités qui le mettent en contact direct avec le public et certaines aptitudes de comédien.

Pendant huit ans, il a produit avec un partenaire une émission radiophonique intitulée « Dans les griffes du loup » à CISM 89,3 FM. Il y était question d’histoire et de folklore. À une certaine époque, il a recruté, avec l’aide de travailleurs sociaux, des jeunes de la rue, pour parler ou tenir des rôles dans des saynètes destinées à cette émission.

Stéphane s’adresse à des publics de tous âges. Il fait régulièrement de l’animation pour des groupes scolaires. Les difficiles négociations entre les employés de l’État et le gouvernement libéral, qui est déterminé à imposer son programme d’austérité, le placent d’ailleurs dans une position délicate cet automne.

En attendant que la situation se clarifie, vous pouvez suivre ses activités sur son site WEB. Il anime par exemple cet automne la série de soirées de contes « Attendez que je vous raconte » à la maison Brignon-dit-Lapierre, une résidence historique sur le Boulevard Gouin, tout juste à l’est du Pont Pie-IX. Certains soirs, il y sera lui-même conteur.

Allez-y faire un tour. Vous ne devriez pas vous ennuyer!

Deux côtés de Stéphane

Vincent G.

Mise à jour, 5 janvier 2016

Comme certain l'auront peut-être relevé à la lecture de l’article final de l’édition 2015 de Quartiersnord.photos  portant sur Ahmed B., il est possible que la fermeture de Cité Historia ne soit que temporaire et que l'organisme muséal puisse reprendre ses activités après un assainissement de ces finances et une restructuration. Vincent Garneau m'a d'ailleurs précisé qu'il a reçu un avis de mise-à-pied temporaire. Ses collègues et lui seraient heureux d’un tel dénouement.

Par ailleurs, la fondation de la Société d'Histoire d'Ahuntsic-Cartierville n'a pas de rapport direct avec la situation de Cité Historia. Un groupe, dont Vincent faisait partie, travaillait bénévolement depuis le printemps 2015 à sa mise sur pied motivé par la conviction qu'un tel organisme était une nécessité.

Texte original du 21 juillet 2015

Par une belle journée, j’ai frappé à la porte de Cité Historia, un organisme qui a le statut d'institution muséale reconnue, en demandant si un membre du personnel habitant l’arrondissement serait disposé à répondre à quelques questions et à se faire croquer le portrait. C’est Vincent, directeur développement historique, qui se porta volontaire quelques jours plus tard.

Montréalais natif d’Hochelaga et ayant habité, entre autres, à Pointe-aux-Trembles, c’est par un emploi d’été à Cité Historia en 2008 que Vincent a connu le quartier. Il y fut initialement agent d’accueil alors qu’il complétait sa maîtrise en histoire à l’UQAM. De fil en aiguille, il a occupé divers emplois à Cité Historia, dont Gestionnaire de projet pour le renouvellement de l'exposition à la  maison du Pressoir. Bien que la préparation de la nouvelle exposition fût préparée par une firme de consultants, Vincent et ses collègues tenaient à avoir leur mot à dire dans l’élaboration des contenus.

Son champ d’études personnel est l’histoire qui se fait par l’action des citoyens. Il a porté un intérêt marqué aux années 60 et aux regroupements marquants que furent les comités de citoyens des quartiers populaires du sud-ouest et de l’est de Montréal.

Ne connaissant pas Ahuntsic-Cartierville à son arrivée, il a appris depuis à apprécier ce quartier que bien des habitants des arrondissements centraux associent à la banlieue. Il y souligne en particulier la présence de trois types d’organisation du territoire : la persistance des noyaux villageois du Sault-au-Récollet et de Bordeaux, les quartiers à plus forte densité typique de la ville apparus avant 1950 et les développements plus récents qui ont effectivement plus à voir avec l’automobile et Laval qu’avec le Plateau. Il s’est d’ailleurs montré déçu qu’un lieu comme le Parc-nature de l’Île-de-la-Visitation soit associé sur certaines cartes touristiques au Grand Montréal plutôt qu’à la ville même. C’est à l’entrée de ce parc que sont situés les bâtiments de Cité Historia : la maison du Pressoir, qui loge les salles d’exposition, et la maison du Meunier, devant laquelle il est photographié.

Aujourd’hui, Vincent, qui habite dans le district Ahuntsic, a de belles raisons d’apprécier cet environnement. Il y a rencontré sa compagne et ils sont parents d’un enfant de quelques mois.

Dans mes notes, je vois qu’il m’a dit que Cité Historia avait des projets en rapport à la mémoire vivante. Si vous le rencontrez au travail, il sera surement disposé à vous en dire plus.

 

Vincent G. devant la maison du Meunier